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Colloque international – 7 et 8 juin 2017- L’idée de nature au fil des siècles : arts, littératures, philosophie et société

Publié le 18 mai 2021 Mis à jour le 18 mai 2021
Date(s)

du 7 juin 2017 au 8 juin 2017

Regards croisés France- Italie n° 2 – Colloque international - UCA Clermont-Ferrand L’idée de nature au fil des siècles : arts, littératures, philosophie et société

Le projet de ce colloque se situe dans la continuité avec la première rencontre « Regards croisés France-Italie » qui a eu lieu à l’Université de Macerata en mars 2014 et qui a été suivie par la publication d’un premier cahier de la part d’EUM (Editions de l’Université de Macerata) en 2015. La collaboration entre l’UCA et l’Université de Macerata s’est renforcée au fil des années, tout d’abord par la venue à Clermont-Ferrand du Prof. Alfredo Luzi, en tant que professeur invité au Département d’Italien en 2003, puis en 2004-2005 et en 2006-2007 ; deuxièmement, par l’établissement d’accords Erasmus dans les deux sens et finalement par la mise en place en 2013 du Master binational EIFI (Etudes Interculturelles Franco-Italiennes), qui connait un succès croissant auprès des inscrits des deux côtés. Le Département d’Italien de l’UCA ainsi que le Dipartimento di Studi Umanistici de l’Université de Macerata souhaitent renforcer de plus en plus cette collaboration, très féconde aussi bien sur le plan de la recherche que de l’enseignement. Tandis que la première journée d’études « Regards croisés » avait exploré l’histoire des relations culturelles franco-italiennes entre la Renaissance et l’époque contemporaine sous l’angle du conflit, le colloque dont le projet est présenté ci-dessous, se propose d’explorer la contribution réciproque des cultures française et italienne dans l’appréhension et le développement de la notion de nature, dans ses dimensions scientifique et laïque, mais également religieuse et spirituelle. Il s’agit d’une thématique non seulement d’une actualité brûlante (il suffit de penser aux découvertes récentes dans le domaine de la médicine, des biotechnologies), mais qui traverse la civilisation européenne dès sa naissance (à partir de l’Antiquité), en concomitance avec l’affirmation progressive de la subjectivité du regard de l’homme sur le monde qui l’entoure.

Appel à communication

Le rapport controversé de la civilisation humaine à la nature est l’un des fils rouges marquant l’évolution de la production littéraire en France et en Italie, ainsi que la réflexion philosophique et la représentation artistique. La notion de nature semble suivre, voire influencer, la dynamique sociale et s’articuler avec la perception du « moi » dans le contexte des relations à « l’autre ». En même temps, la découverte et l’exploration des lois de la nature à partir du XVe siècle dans les domaines les plus variés (physique, astronomie, biologie…) tandis qu’elle pose les bases de la méthode expérimentale, suscite également des résistances, des oppositions débouchant souvent dans la censure (religieuse, politique) et parfois l’autocensure et le déni de la dimension scientifique nécessaire à la compréhension du monde naturel. D’un autre côté, la nature pour Ficin est animée par une sorte d’art, une puissance dynamique dont il faut saisir le mystère et qu’il faut savoir imiter. La relation harmonieuse à la nature, d’une nature fille de Dieu, régulatrice des mouvements célestes comme des activités terrestres dans la Comédie de Dante à une nature immanente et intelligible s’identifiant à Dieu dans la pensée de la Renaissance, en passant par la nature comme état originaire dont l’homme s’est inexorablement séparé, mais encore récupérable, chez Montaigne et Rousseau, connait un point de rupture (de non-retour ?) dans le passage entre le XVIIIe et le XIXe siècles : l’état de bonheur des origines de l’humanité non seulement apparaît comme irrémédiablement perdu, mais il n’a peut-être jamais existé. La nature marâtre léopardienne nous met face à l’acquisition irréversible de l’état de culture, mais également à notre propre appartenance à cette matière qui nous répugne et dont pourtant le monde consiste. La nature que Faust voulait connaître au prix d’un pacte avec le diable, puis soumise aux lois mécaniques des positivistes, se transforme en objet d’analyse scientifique mais surtout anthropologique, si bien que l’effort du début du XXe siècle de la ramener à une identification avec l’esprit de matrice hégélienne ne saurait effacer la volonté de maîtriser et exploiter l’espace naturel. C’est cet espace qui constitue pour les arts plastiques et figuratifs à partir du Romantisme une source de stimulations sensorielles complexes, tandis que la représentation artistique de la nature, s’identifiant surtout au paysage, manifeste la volonté de l’artiste (de tout homme) de trouver sa place, voire de se fondre, dans l’espace qui l’entoure, sans toutefois être en mesure de reconstituer l’idylle originaire.

D’où un sentiment de culpabilité et d’aliénation différemment décliné dans les produits artistiques et littéraires entre XXe et XXIe siècles, mais également le déclenchement des forces contraires, de la théorie du super-homme à la réification d’individus au-dessous d’un supposé degré de perfection naturelle.

A partir de la deuxième moitié du XXe siècle, la problématique épistémologique dans les différentes branches du savoir s’est orientée vers l’antinomie : nature versus « nurture », inné versus acquis, en d’autres termes vers l’opposition entre la nature (considérée comme héritage individuel et patrimoine génétique) et environnement (en tant que somme de culture et d’expérience).

On peut penser aux études de Durkheim, le sociologue français pour qui la réalité des faits sociaux est supérieure à la somme de leurs parties, ou aux recherches de Franz Boas, l’anthropologue allemand-américain, persuadé que c’est la culture qui forge la nature humaine et jamais l’inverse, pour en arriver à la théorie pédagogique de Piaget sur imitation et apprentissage et finalement à l’application de l’opposition entre le dualisme originaire des phénomènes naturels et le monisme dynamique des forces en compensation dans les processus de la réalité dans la pensée de Marius Schneider sur la signification de la musique.

Le colloque se propose de reconstituer ce parcours tortueux, où le retour en arrière, à l’état de nature, et l’impulsion à l’affirmation du « moi » par le biais de la connaissance et de la maîtrise de l’espace et des ressources naturels, s’entrecroisent, s’entrechoquent, s’harmonisent rarement, suivent le plus souvent des chemins parallèles débouchant sur des notions opposées de la place de l’homme dans le monde.

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